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Une mémoire fragmentée : représenter et préserver le patrimoine palestinien / A Fragmented Memory: Representing and Preserving Palestinian Heritage
Constance Jame  1@  , Léa Vicente  2, *@  
1 : Universität Heidelberg
Institut für Europäische Kunstgeschichte
2 : Chercheuse indépendante
Chercheuse indépendante, (Chercheuse indépendante)
* : Auteur correspondant

Au gré des restructurations de ses frontières, la Palestine en tant que territoire a été et est le sujet de violences qui ont mené à la spoliation, la translocation et la destruction de son patrimoine. L'offensive israélienne qui se déroule depuis l'attaque du 7 octobre 2023 a mené au pillage et à la destruction de nombreux bâtiments historiques tels que la Qasr Al-Basha, la grande mosquée Al-Omari ou bien l'église Saint-Porphyre, mais aussi des institutions culturelles comme le musée Al-Qarara ou les archives centrales de Gaza. À la destruction du patrimoine historique s'ajoute la disparition d'artistes gazaouis, ayant pour conséquence l'absence progressive d'une scène artistique contemporaine in situ.

L'Afrique du Sud dans sa requête portée devant la Cour Internationale de Justice en décembre 2023 a alerté sur le caractère intentionnel de ces destructions du patrimoine de Gaza. Ces atteintes pouvant constituer les prémices d'un « génocide culturel » violent la Convention de La Haye de 1954 sur la protection des biens culturels en cas de conflit armé. 

Cette politique d'annihilation du patrimoine palestinien est excercée depuis 1948 dans le but de créer, de légitimer et d'enraciner les mythes fondateurs de l'État israélien. Ce dessein a mené et mène non seulement à l'anéantissement et à l'invisibilisation des traces de son histoire mais également à la dépossession voire à la transformation et donc à la réappropriation d'anciens espaces urbains, de sites archéologiques, de lieux sacrés et des biens culturels.

Dans ce contexte, le panel invite des contributions sur la question de ce qu'est le patrimoine palestinien et de son devenir. Comment le patrimoine se définit et se redéfinit face aux destructions et au mouvement des frontières ? Quelles pratiques de conservation et de documentation sont mises en place pour protéger et conserver la mémoire de ce patrimoine déplacé ou effacé ? De quelles manières ce patrimoine dispersé sur un territoire éclaté et inaccessible est-il géré et préservé ? Dans ces conditions, comment la population palestinienne et sa diaspora interagissent avec ce patrimoine ?

Parallèlement aux destructions délibérées recensées par l'UNESCO, des pratiques de pillage du patrimoine ont été enregistrées dans des musées, sur des sites archéologiques, ou dans des collections privées. Ces pillages engendrent une translocation des biens culturels pouvant circuler sous l'autorité israélienne dans les institutions ou sur le marché de l'art. Cela pose alors la question de l'écriture de l'histoire qui se joue dans ces musées à travers l'appropriation de ce patrimoine. Quelle place ont ces objets dans ces musées ? Comment documenter, raconter, garder une trace et constituer une archive de ces institutions ? 

L'appel est ouvert à des communications dans une approche transdisciplinaire sur des problématiques contemporaines mais aussi historiques témoignant de la continuité des atteintes au patrimoine matériel et immatériel palestinien et des initiatives développées pour le préserver, sur les territoires israélien, palestinien et au delà de leurs frontières. 

 

A Fragmented Memory: Representing and Preserving Palestinian Heritage 

As its borders have been restructured, Palestine as a territory has been and is the subject of violence that has led to the looting, translocation and destruction of its heritage. The Israeli offensive, which has been underway since the attack on 7th October 2023, has led to the looting and destruction of numerous historic buildings such as the Qasr Al-Basha, the great Al-Omari mosque and the church of Saint Porphyry, as well as cultural institutions such as the Al-Qarara museum and the central archives of Gaza. The destruction of the historical heritage has been compounded by the disappearance of Gazan artists, resulting in the gradual absence of a contemporary art scene in situ.

In its request to the International Court of Justice in December 2023, South Africa warned of the intentional nature of the destruction of Gaza's heritage. These attacks, which could constitute the beginnings of “cultural genocide”, violate the 1954 Hague Convention on the Protection of Cultural Property in the Event of Armed Conflict. 

This policy of annihilating Palestinian heritage has been pursued since 1948 with the aim of creating, legitimizing and entrenching the founding myths of the Israeli state. This aim has led, and continues to lead, not only to the annihilation and disappearance of the traces of its history, but also to the dispossession and even the transformation, and therefore the reappropriation, of ancient urban spaces, archaeological sites, sacred places and cultural goods.

In this context, the panel invites contributions on the question of Palestinian heritage and its future. How is heritage defined and redefined in the face of destruction and shifting borders? What conservation and documentation practices have been put in place to protect and preserve the memory of this displaced or erased heritage? How is this heritage, scattered over a fragmented and inaccessible territory, managed and preserved? How do the Palestinian population and its diaspora interact with this heritage? 

Alongside the deliberate destruction recorded by UNESCO, looting of heritage has been recorded in museums, archaeological sites and private collections. This looting has led to a translocation of cultural goods that can circulate under authority in institutions or on the art market. This raises the question of the history being written in these museums through the appropriation of this heritage. What place do these objects have in these museums? How can we document, recount, keep track of and build up an archive of these institutions? 

The call is open to papers with a transdisciplinary approach to both contemporary and historical issues, bearing witness to the continuity of attacks on the tangible and intangible Palestinian heritage and the initiatives developed to preserve it, in the Israeli and Palestinian territories and beyond their borders.

 

Bibliographie

ABU EL-HAJ, Nadia. Facts on the Ground. Archaeological Practice and Territorial Self-Fashioning in Israeli Society (Chicago / London: The University of Chicago Press, 2001).

BUTLER, Beverly. « ‘Keys of the Past: Keys to the Future' - A Critical Analysis of the Construction of the Palestinian National Museum Policy as an Alternative Deconstruction of Routinised International Heritage Discourse », Present Pasts, vol. 2, no. 1, 2010, p.113-125.

KHALIDI, Walid. All that remains : The Palestinian Villages Occupied and Depopulated by Israel in 1948 (Beyrouth: Institute for Palestine Studies, 1992).

PAPPE, Ilan. Le nettoyage ethnique de la Palestine (Paris : La Fabrique éditions, 2024).

PICAUDOU, Nadine. Territoires palestiniens de mémoires (Paris / Beyrouth: Editions Karthala et Ifpo, 2006).

SLITINE, Marion. La Palestine en créations. La fabrique de l'art contemporain, des territoires occupés aux scènes mondialisées, thèse de doctorat, EHESS, 2018.

TAHA, Hamdan. « Jerusalem's Palestine Archaeological Museum », Jerusalem Quarterly, vol. 91, 2022, p.59-78.

 TAHA, Hamdan. « Destruction of Gaza's Cultural Heritage », Jerusalem Quarterly, vol. 97, 2024, p.45-70.

 


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