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Quand parler de racialisation ? Trouver les mots de la minorisation et de la discrimination au Moyen-Orient et au Maghreb / When to speak of racialisation ? Choosing the right words for minorisation and discrimination in the Middle East and North Africa
Kahina Guillard  1, 2@  , Solenn Al Majali  3, 4, *@  
1 : Centre de Recherches Moyen-Orient Méditerranée  (CERMOM EA 4091)
INALCO
2 : Centre d'études en sciences sociales sur les mondes africains, américains et asiatiques  (CESSMA UMRD 245)
Institut de recherche pour le développement [IRD], INALCO, Université de Paris Cité (UPC)
3 : Temps, espaces, langages Europe méridionale-Méditerranée  (TELEMME)
Aix Marseille Université, Centre National de la Recherche Scientifique, Aix Marseille Université : UMR7303 / UMR6570 / UMR9958, Centre National de la Recherche Scientifique : UMR7303 / UMR6570 / UMR9958
4 : Fondation de la Croix-Rouge française : Pour la recherche humaniatire et sociale  (Fondation Croix-Rouge française)
Comité International de la Croix Rouge
* : Auteur correspondant

La racialisation, à savoir “[...] la construction de la race comme entité sociale et les processus d'assignation qui la constituent.” [Brun Solène et Cosquer Claire, 2022], est un objet des sciences sociales plutôt appliqué aux mondes occidentaux ou coloniaux. Elle intervient peu dans les études aréales du Moyen-Orient et du Maghreb. Elle fait irruption dans des littératures qui mettent en lumière des phénomènes transnationaux comme la migration [El Miri, 2020]. Si la racialisation englobe les expériences de discimination et la minorisation, l'inverse n'est pas systématique. 

 Définir le concept de racisme ou encore le processus de racialisation, procédés à la fois mouvants, dynamiques, insaisissables et instables, représente une difficulté non négligeable [Zoubir, 2023]. Inconsciemment nombre de chercheurs sont réticents à son utilisation pour discuter leur cas d'étude sur les périphéries identitaires du Moyen-Orient et du Maghreb. Cette frilosité s'explique aussi par la complexité à penser les études aréales du MOMM avec un concept traditionnellement attribué au champ des études américanistes, puis européennes [Essed, 1991]. Dès lors, nous souhaitons mettre au défi les participants de l'envisager en pensant la minorisation et la discrimination à l'aune du racisme. 

 Dans cet atelier, il s'agira de réfléchir ensemble, à partir d'une diversité disciplinaire et géographique, sur ce que la question raciale apporte ou non à la compréhension des groupes au Moyen-Orient et au Maghreb et aux constructions nationales de leurs États. Les présentations qui tenteront de penser leurs terrains en écho à d'autres aires géographiques seront particulièrement appréciées. 

 Axe 1 : Terminologie des notions (marges, minorités, racialisation, racisme)

 Penser les marges des Etats du Moyen-Orient et du Maghreb s'est fait en sciences sociales par des catégories et concepts aux frontières flottantes, adoptées puis contestées : ethnie, peuple, ou encore minorité  [Barth, 1969]. Dès lors que la recherche porte sur ces catégories, il est plus fréquent d'employer les termes de discrimination et de répression plutôt que celui de racisme. Ici, nous souhaiterions que la place soit faite au rapprochement entre expériences de discrimination au MOMa et questions raciales, et ce à partir de cas issus de données empiriques. 

Axe 2 : Rencontres des altérités en contexte migratoire

Les dynamiques migratoires au Maghreb et au Moyen-Orient contribuent à une co-présence ethnico-sociale et statutaire diverse et plurielle. Les migrants et réfugiés s'insèrent très souvent dans les interstices urbains des villes, entraînant l'expérience d'altérités multiples. Cet axe accordera une attention toute particulière aux processus d'altérisation, aux relations interethniques et aux sociabilités multiculturelles à travers les phénomènes migratoires.

Axe 3 : La fabrique des discours sur l'Autre

Les communications apporteront aussi une réflexion sur la conception de l'altérité au sommet de l'Etat [Cagaptay, 2004]. Comment l'Etat a contrôlé les circulations intellectuelles, les mobilités transnationales et revendications nationalistes des populations sur son territoire [Ergin, 2008]? Comment définit-il l'Autre, lorsqu'il devient ennemi de l'intérieur ?

Bibliographie :  

Barth Fredrik, 1969, Ethnic groups and boundaries. 

Brun Solène et Cosquer Claire, 2022, Sociologie de la race, Paris, Armand Colin.

Cagaptay Soner, 2004, « Race, Assimilation and Kemalism: Turkish Nationalism and the Minorities in the 1930s », Middle Eastern Studies.

Doraï Kamel et Puig Nicolas, 2016, L'urbanité des marges. Migrants et réfugiés dans les villes du Proche-Orient, Paris, Téraèdre.  

El Miri Mustapha, 2020, « Devenir « noir » sur les routes migratoires: Racialisation des migrants subsahariens et racisme global », Sociologie et sociétés, vol. 50, n° 2 : 101‑124. 

Ergin Murat, 2008, « “Is the Turk a White Man?” towards a Theoretical Framework for Race in the Making of Turkishness », Middle Eastern Studies, vol. 44, n° 6 : 827‑850.

Essed Philomena, 1991, Understanding Everyday Racism: An Interdisciplinary Theory, SAGE.

 Zoubir Zacharias, 2023, Racisme : genèse et épistémologie d'un concept de lutte, Thèse de doctorat, Paris 10.

 

Résumé en anglais :

When to speak of racialisation ? Choosing the right words for minorisation and discrimination in the Middle East and North Africa

Racialization, meaning ‘[...] the construction of race as a social entity and the processes of assignment that constitutes it'. [Brun Solène and Cosquer Claire, 2022], is a social science object that tends to be applied to Western or postcolonial worlds. It plays little part in areal studies of the Middle East and North Africa. Nevertheless, it emerges in a literature highlighting transnational phenomena such as migration [El Miri, 2020]. While racialisation encompasses experiences of discimination and minorisation, the contrary is not systematic. 

Defining the concept of racism, or the process of racialization—both fluid, dynamic, elusive, and unstable—represents a significant challenge [Zoubir, 2023]. Many researchers, often unconsciously, are reluctant to discuss their case studies on the margins of identity in the Middle East and North Africa. This hesitancy also stems from the difficulty to conceive area studies of the MENA with an concept traditionally attributed to the field of Americanist and then European studies [Essed, 1991]. We wish to challenge the participants to do likewise, and to develop minorization and discrimination in terms of racism. 

In this workshop, we will consider, within our disciplinary and geographical diversity, what the racial question may or may not contribute to the acknowledgment of Middle Eastern and North African groups and the national construction of the states to which they belong. Presentations considering their work in relation to other geographical areas will highly be appreciated. 

Theme 1: Terminological discussion of notions (margins, minorities, racialization, racism)

Margins in the region have been thought in social sciences through categories and concepts with blurried boundaries, adopted and further contested: ethnicity, people, or minority [Barth, 1969]. When focusing on these categories, research often employs terms such as discrimination and repression rather than racism. Attention will be paid to studies connecting experiences of discrimination in the MENA region with racial issues, based on empirical data.

Theme 2: Encounters with Otherness in migratory contexts

Migration dynamics in the Maghreb and the Middle East regions contribute to a diverse ethno, social and status-based “co-presence”. Migrants and refugees often settle in the urban interstices of cities, leading to the experience of multiple forms of Otherness. This theme will pay particular attention to processes of othering, interethnic relations, and multicultural sociabilities through migratory phenomena.

Theme 3: The production of discourses on the Other

Within this last theme, panelists will also reflect on state's conception of Otherness [Cagaptay, 2004] and intend to answer how controlled intellectual exchanges, transnational mobilities, and nationalist claims of populations within their territories [Ergin, 2008]. How does it define the Other, when the Other becomes an internal enemy?

Bibliography : 

Barth Fredrik, 1969, Ethnic groups and boundaries

Brun Solène et Cosquer Claire, 2022, Sociologie de la race, Paris, Armand Colin.

Cagaptay Soner, 2004, « Race, Assimilation and Kemalism: Turkish Nationalism and the Minorities in the 1930s », Middle Eastern Studies.

Doraï Kamel et Puig Nicolas, 2016, L'urbanité des marges. Migrants et réfugiés dans les villes du Proche-Orient, Paris, Téraèdre.

El Miri Mustapha, 2020, « Devenir « noir » sur les routes migratoires: Racialisation des migrants subsahariens et racisme global », Sociologie et sociétés, vol. 50, n° 2 : 101‑124. 

Ergin Murat, 2008, « “Is the Turk a White Man?” towards a Theoretical Framework for Race in the Making of Turkishness », Middle Eastern Studies, vol. 44, n° 6 : 827‑850.

Essed Philomena, 1991, Understanding Everyday Racism: An Interdisciplinary Theory, SAGE.

Zoubir Zacharias, 2023, Racisme : genèse et épistémologie d'un concept de lutte, Thèse de doctorat, Paris 10.


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