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Re-examiner les élites au Moyen-Orient : approches comparatives plurielles
Claire Beaugrand  1, *@  , Louise Rautureau  2, *@  
1 : Institut de Recherche Interdisciplinaire en Sciences Sociales  (IRISSO)
CNRS, Université Paris Dauphine - PSL
2 : Laboratoire de Changement Social et Politique  (LCSP (URP_7335))
Université Paris-Cité, IFPO
* : Auteur correspondant

Résumé scientifique (Français) - (3341)

Cet atelier se propose de réexaminer la notion d' élite(s) au Moyen-Orient, entendu au sens large (Iran et Turquie compris) et en Afrique du Nord à partir d'approches plurielles interdisciplinaires, incluant sociologie politique, sociologie urbaine, anthropologie, histoire des milieux intellectuels ou artistiques. Dans une région en pleine transformation, marquée par des décennies de libéralisation de l'économie (Hanieh, 2018) et du marché du travail, l'implantation de réformes sociales et l'approfondissement des fractures politiques, la question de la définition de la notion d'élites se pose plus que jamais en des termes nouveaux (Camau, 2020) : l'évolution de leurs rôles, des représentations et des discours de légitimations sur lesquelles elles se construisent mérite une attention renouvelée. Cette réflexion est d'autant plus cruciale dans le contexte du Moyen-Orient, car elle permet de proposer une nouvelle manière de définir le concept d'élite, là où les critères établis dans la recherche occidentale ne sont pas toujours pertinents. Cet atelier ambitionne donc de rassembler des contributions variées pour explorer, à nouveaux frais, ce que signifie d'appartenir à une/des/l' « élite(s) » dans différents contextes nationaux et sectoriels dans la région.

Les élites au Moyen-Orient et en Afrique du Nord ont souvent été étudiées sous l'angle des dynamiques de pouvoir autoritaire ou des systèmes de clientélisme politique : revenant sur son texte fondateur sur la Tunisie, datant de 1973, Michel Camau (2020) met en lumière le rôle incontournable des indépendances dans la définition originelle des élites. L'étude des transformations des catégories socio-professionnelles a ensuite élargi les champs sectoriels étudiés qui définissent les élites - parfois en creux (Longuenesse, 2007). Dans le droit fil de ces travaux, l'atelier vise à analyser la transformation des structures sociales et par là même des élites à leur sommet, en portant une attention particulière à des paramètres comme le genre, la race, les parcours éducatifs, ou les héritages familiaux.

Les axes de réflexion principaux incluront une discussion autour des critères de définition des élites, en prenant en compte les réalités spécifiques à chaque pays étudié par les intervenants. Cet axe inclura une approche relationnelle et étudiera la manière dont ces élites interagissent entre elles et avec et les autres segments de la société. L'atelier abordera également les rapports qu'entretiennent ces élites avec l'Etat, en interrogeant leur rôle dans la stabilité ou le changement politique mais aussi la pertinence de la variable des régimes (monarchiques ou républicains), d'une part, et d'autre part la place qu'elles occupent au sein de l'économie mondialisée ou, au contraire, à l'échelle locale (Wagner, 2011), questionnant, de façon critique, par exemple, la construction des classements de « personnalités les plus influentes de l'année .

Les intervenants seront invités à partager des études ancrées dans le terrain, portant sur différentes formes d'élites – économiques, politiques, culturelles, féminines etc. – afin de favoriser, par cette plateforme d'échange, l'émergence de perspectives croisées entre des cas d'études peu comparés. Les contributions explorant la dimension spatiale du phénomène élitaire seront aussi les bienvenues.

Résumé scientifique (Anglais)

This workshop aims to reexamine how we understand the notion of elite(s) in the Middle East, (broadly defined as encompassing Iran and Turkey) and North Africa, through multiple interdisciplinary approaches, including political sociology, urban sociology, anthropology, and intellectuals or artists' history. As the region goes through significant transformations, marked by decades of economic liberalization (Hanieh, 2018), labor markets' changes, the implementation of social reforms, and the deepening of political fracture lines, defining the concept of “elites” takes a new salience (Camau, 2020). It matters more than ever to analyze the evolution of elites' roles, the representations, and the legitimization discourses on which they are built. And it matters to do so in the context of the Middle East, as it enables us to propose a new way of defining the concept of elites, and over come the limits of criteria and theories emanating from Western case studies. Therefore, this workshop aims to present a variety of contributions all exploring what it means to belong to an "elite(s)" in different national and sectoral contexts within the region.

In the Middle East and North Africa, elites have often been studied through the lens of authoritarian power dynamics or political clientelism. Revisiting his seminal text on Tunisia darted 1973, Michel Camau (2020) highlights the pivotal role of independence movements in the original definition of elites. Research that later studied the transformations of socio-professional categories further expanded the sectoral fields that defined elites—if negatively (Longuenesse, 2007). Building on these important works, the workshop aims to analyze the transformation of social structures and of the elites at the top, with particular attention to parameters such as gender, race, educational paths, or family legacies.

The main axes of reflection will include a discussion on the criteria defining elites, taking into account the idiosyncrasies of each country under study. This axis will apply a relational approach and look at the ways in which these elites interact with each other and with other segments of society. The workshop will also focus on the relationship between these elites and the state, examining their role in keeping the status quo or enacting change, as well as testing the relevance of different regimes (monarchical or republican), on the one hand, and, on the other, analyzing the place they occupy within the globalized economy or, on the contrary, at the local level (Wagner, 2011), critically questioning, for example, the construction of rankings of the “most influential personalities of the year”.

Participants are invited to share field-based studies on various forms of elites—economic, political, cultural, female, etc.—in order to foster, through this platform, the emergence of cross-perspectives between case studies that are rarely compared. Contributions exploring the spatial dimension of the elite phenomenon are also welcome.

Bibliographie :

● Camau, Michel « L'étude des élites tunisiennes. Retour sur « un domaine de prédilection », mars 2020, https://www.academia.edu/

● Camau, Michel “Le discours politique de légitimité des élites tunisiennes,” dans TEITLER M.et al., Élites, pouvoir et légitimité au Maghreb, Paris, éditions du CNRS, 1973 p. 29-72.

● Hanieh, Adam, Money, Markets, and Monarchies: The Gulf Cooperation Council and the Political Economy of Contemporary Middle East, Cambridge: Cambridge University Press, 2018.

● Longuenesse, Elizabeth Professions et société au Proche-Orient, Déclin des élites, crise des classes moyennes, Presses Universitaires de Rennes, coll. Res Publica, 2007, 228 p.

● Wagner, Anne Catherine « Les classes dominantes à l'épreuve de la mondialisation », Actes de la recherche en sciences sociales, vol. 190, no. 5, 2011, 4-9.

 


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